Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
27 décembre 2023 3 27 /12 /décembre /2023 21:31

Venant de récupérer un acte de partage de 1836, concernant Lasbordes à Arue nous avons eu le plaisir de découvrir le nom de certaines landes ou "broustés".

Dans cet acte, différents noms viennent qualifier des parcelles ou des zones de terrain en fonction de leur nature.

Nous allons en donner la signification la plus locale possible avant d'en retrouver le toponyme qui évidemment n'était pas parvenu jusqu'à nous même par tradition orale.

Nous connaissions le Pas du Ka qui avait fait l'objet d'un article sur ce même blog ainsi que le "Hanga" un peu en amont du Pas du ka.

Le Hanga est lieu boueux (dictionnaire  gascon français de l'abbé Vincent Foix) C'est en effet toujours  un marécage. 

 

Nous avons donc trouvé mentionnés : 

L'ayrial :  Normalement orthographié airial. C'est le terrain qui entoure la maison landaise, une pelouse rase plantée de chênes et quelques pins parasol.

Le brousté : Le brousté est soit une lande remplie de broussailles, soit un  jeune taillis.

La lande : La lande est une zone ouverte avec une végétation rase : molinie et bruyère le plus souvent.

Le pignada : Le pignada  est une forêt de pins maritimes.

La grave : Pour cette dénomination cela a été plus difficile. Le mot grave en français désigne un terrain caillouteux ce qui n'est pas le cas chez nous. Par contre si on imagine que le mot a été francisé depuis le gascon (ce qui est souvent le cas dans ces actes notariés)  et qu'on le prononce à la gasconne, on a "Grabe" qui correspond à un bourbier.

 

Ces noms génériques qui désignent plus ou moins la nature de la parcelle se voient complétés par le point cardinal :  ce qui donne "lande de bise (nord)" ou "pignada de la grave de capbat (ouest)". Dans ce cas, on apprend que c'est un bois de pin, en zone humide à l'ouest de la propriété.  On trouve aussi "pièce de mijour" (mijour littéralement midi, donc sud.)

Mais aussi ces pièces ont parfois un nom : " jardin du houzin" ou terre "labourable la nouguère."

Le terme de houzin serait peut-être  à rapprocher de Houziar verbe qui signifie défricher d'après le dictionnaire de l'abbé Foix quand au mot nouguère il se rapporterait de manière évident à  noiseraie, noix ... sauf qu'il n'y a pas de noyer dans les environs et que la nature du sol ne lui est pas favorable du tout... Il faudra trouver une autre explication !

La rédaction de l'acte impose, pour situer les parcelles, de les situer les unes par rapport aux autres ou à celles d'un voisin; ce qui ne rend pas les choses faciles quand on veut les resituer à notre époque. Le texte donnant : " un peu plus de la moitié de la lande dite de bise prise du côté du levant et se terminant en pointe du côté du nord ..."  ou encore : " environ la moitié de la pièce de pignada dite la grave de capbat prise du côté du nord, et confrontant au levant à pignada de Bardin du midi à l'autre partie de ce même pignada..." On peut toujours rechercher sur les recensements le nom des voisins ou des propriétaires voisins, pour s'orienter. Dans le cas présent il a fallu rechercher où habitait ledit Bardin. Ce que nous n'avons pu retrouver.

Il faudra donc pour l'instant nous contenter de lister ces toponymes faute de pouvoir encore les situer sur un plan. Mais nous avons eu aussi le plaisir de retrouver mention de l'existence du four à Pain de Grande-Borde.

 

Partager cet article
Repost0
Published by labbe.arue.over-blog.com
26 novembre 2023 7 26 /11 /novembre /2023 23:12

Dans l'article intitulé "A partir d'une lettre de 1932" ( en page 2 de ce blog) nous évoquions l'arrivée de l'électricité à Arue en mai 1932 . Nous avons depuis retrouvé aux archives quelques documents concernant  la concession et des données techniques sur la fourniture d'électricité.

La consommation électrique en France connait une forte croissance entre les années 20 et 30 puisque sur la décennie 1920 elle a vu sa croissance multipliée par 4,5.

Les Pyrénées sont alors le siège de  nombreux travaux de réalisations d'ouvrage hydroélectriques, visant notamment à fournir de l'énergie au Sud-ouest de la France.  De nombreuses sociétés voient le jour dont La société Hydroélectrique des Basses-Pyrénées, fondée le 5 septembre 1910  qui participe par exemple au capital de la Société des Forces Motrices de la Vallée d'Aspe  créée à la fin de l'année 1920. 

Cette société a de nombreuses usines à Mouguerre, Oloron, Orthez, Estaens, aux Forges d'Abel et distribue son électricité avec  5108km de lignes à haute tension et  8046km de lignes basse tension .

C'est la Société  Hydroélectrique des Basses-Pyrénées qui demanda la concession auprès du Syndicat du pays d'Albret pour la commune d'Arue. 

Cette concession prévue pour une durée de 40 années prévoyait de fournir l'électricité à la tension  de115v pour l'éclairage , 200v pour la force motrice et  à la fréquence 50 Hz. La haute tension sera de 15000 volts.

 

 

Dans l'article 11 de la convention on voit qu'il peut être proposé un tarif heures creuses de 22h à 6h. On est en 1927 : on n'a rien inventé ce système a presque 100ans ! La convention prévoyait également des avantages pour les bâtiments communaux.

 

Carte du réseau sur Arue ci dessus et quand même les tarifs ci dessous!

Voilà ce que j'ai pu trouver sur l'électrification d'Arue. J'ai mal cadré mes photos et la légende des cartes n'apparait pas complète. 

Partager cet article
Repost0
Published by labbe.arue.over-blog.com
23 octobre 2023 1 23 /10 /octobre /2023 21:14

Nous avons évoqué déjà plusieurs fois dans ce blog le passé de Lasbordes à Arue, au cours de différent articles : 

 

"Les produits de Lasbordes" 1, 2 et 3

"A partir d'un fait divers à Lasbordes en 1824"

"Petite histoire de Lasbordes"

"Sur un carnet de l'exposition universelle"

"L'inventaire de la faune et de la flore de Lasbordes à Arue"

 

Nous avons ouvert un nouveau blog dédié cette fois-ci aux productions actuelles de Lasbordes.

 

Vous y accèderez en cliquant sur le lien suivant :

https://lasbordes-noisettes.over-blog.com/2023/10/des-noisettes-a-lasbordes.html

 

Partager cet article
Repost0
Published by labbe.arue.over-blog.com
11 mai 2023 4 11 /05 /mai /2023 21:51

 

 

Le 30 août 1874, Louis Labarchède (1), notaire à Roquefort et maire de cette même ville (de 1851 à 1876), demandait au préfet de lui accorder l'autorisation d'établir une pêcherie aux anguilles  sur la Doulouze 35m en aval du moulin de Batan (2) appartenant à Monsieur Dupuy de Mont de Marsan. 

Sa demande (cote AL : 7 M 558), en fait un renouvellement, lui fut accordée sous certaines conditions et en respectant les lois et décrets concernant la pêche fluviale. Cette pêcherie, un gord, devait se situer à 35m en aval du moulin, ne pas barrer la rivière à plus de 3 mètres de la rive, ne pas dépasser de plus d'un mètre en hauteur la limite d'étiage et se terminer par une manche (filet) de 10m dont les mailles se rétréciraient jusqu'à 1cm à l'extrémité. La pêcherie ne devrait fonctionner que la nuit et ce du 1er   octobre au  31  décembre. Tout autre poisson pris dans les filets autre que l'anguille devait être remis à l'eau mort ou vif.

Ces conditions d'exploitation s'appuyaient sur la loi du 15 avril 1829 et du décret du 25 janvier 1868 qui définissaient de manière bien claire les règles de l'exercice de la pêche fluviale, dans l'idée de préserver les ressources en poisson, la libre circulation sur les fleuves car c'est aussi à cette époque qu'apparait la pêche de loisir. 

Il convient de revenir sur la définition d'un gord.

Définition donnée par le littré : ( Littré 1872-1877) : Pêcherie consistant en deux rangs de perches plantées dans le fond de la rivière et formant un angle dont le sommet est fermé par un filet. Etablir un gord.

Le Larousse illustré en  7 volumes de 19  nous donne également :

Dans un article dans le bulletin de la société de Borda ( T3 1982) Jean-Pierre Lescarret nous livre des tableaux  issus pour l'un d'un un questionnaire envoyé aux préfets et maires en 1851 et l'autre par des extraits de la grande enquête agricole de 1852. Concernant la pêche fluviale et plus particulièrement sur la Douze qui nous intéresse ici, on apprends que l'anguille venait en tête des poissons pêchés avec 35881kg (sur tout le domaine fluvial landais) avec un prix de 0.8f le kilo alors que la viande de boeuf valait 0.7f le kilo.

Sur la Douze (3) il y avait 12 pêcheurs professionnels ( salaire 1f par jour) , la zone pêchée était longue de 27,5km (pour une longueur totale de 123.5km). On y pêchait 170kg  d'anguilles 400kg de carpes, 200kg de tanches mais aussi des goujons, et des brochets... Ces pêches pratiquées souvent au verveux et à l'épervier.

Quant à l'anguille, elle prend naissance dans la mer des sargasses pour arriver sur nos côte sous l'apparence des civelles ou piballes et remonter nos fleuves et rivières où elle va se développer pour devenir l'anguille jaune. Une évolution de son corps l'amènera à la maturité sexuelle, et elle deviendra l'anguille argentée qui est plus grosse, avec des nageoires plus développées et des yeux plus proéminents. Elle redescendra les rivières alors vers la mer pour retourner se reproduire aux Sargasse. C'est à ce moment qu'elle était pêchée , c'était l'anguille d'avalaison. C'est cette dernière qui était vraisemblablement pêchée à Roquefort au moulin de Batan.

 

 

1 : Louis Labarchède était notaire à Roquefort, dont il fut le maire de 1851 à 1876. Il fut également conseiller général du canton de Roquefort de 1864 à 1876. Il démissionna ce ses fonctions suite à une banqueroute de 600 000 francs dont seulement 200 000 francs furent couverts par la vente de l'étude et de ses biens personnels. Le fait fut relaté dans le journal Républicain Landais du 26 et 31 mars 1876, mais aussi dans le Journal du Cher du 6 avril 1876 et le Temps du 5 avril 1876.

2 : Le moulin de Batan : Le nom de Batan se retrouve souvent  pour des moulins comme celui de Barbaste sur la Gelise par exemple. On trouve  des données intéressantes sur celui de Roquefort sur le site internet de l'INPN en tapant Moulin de Batan Roquefort. D'après le dessin  qui nous est donné ici, la particularité de ce moulin réside aussi dans le fait que situé dans une boucle de la rivière (Doulouze) il capte directement l'eau de la rivière et la restitue en aval en profitant de la boucle : il n'y a donc pas de canal d'amenée comme sur la plupart des moulins.

3 : La Douze : voir article sur ce même blog.

Partager cet article
Repost0
Published by labbe.arue.over-blog.com
10 janvier 2023 2 10 /01 /janvier /2023 22:44

 Nous connaissons  l'importance de la culture du seigle dans les Landes, et ses particularités :

une culture sur billons, associée à d'autres cultures panis ou maïs. Pas de jachères et une demande en fumier importante.

Dans ce blog nous avons déjà abordé le rôle de l'élevage du mouton pour couvrir cet apport en fumier, nous avons vu le rôle des boeufs  et les consorces. Nous allons maintenant essayer de retrouver à travers les photos de Félix Arnaudin les spécificités de ce mode de culture. Les reproductions de ces photos n'ont évidemment pas la qualité des originales.

Cette méthode culturale est très bien décrite par Jean-Pierre Lescarret dans son livre intitulé : La vie dans la Grande Lande au temps des bergers et des loups (Cairn mai 2008) mais aussi par Pierre Leshauris  qui dans son livre ceux de Lagraulet (Cairn 2005) , histoire de sa famille, décrit la même méthode avec quelques variantes dues à l'époque plus tardive à laquelle il fait référence.  Grâce au répertoire des photos de Félix Arnaudin contenu dans l'index général (tome I de ses oeuvres complètes. confluence fév 2007) nous avons une localisation précise des photos ainsi qu'élément précieux la date de prise ce qui resitue bien la période des travaux pour chaque photo.

Les semailles et les labours :

Cette photo a été prise le 9 novembre 1893 vraisemblablement à Gaillard à Lüe (propriété dont était originaire la famille Arnaudin). Cette photo décrit bien le mode opératoire :

D'abord à l'arrière plan ( à gauche sur la photo) le semeur, suivi de trois femmes ( à droite sur la photo) qui mélangent la semence au fumier avec des râteaux.

Au premier plan on voit les billons ( espacés d'environ 75 cm) qui viennent d'être fait par l'attelage de boeufs guidé par la femme qui marche devant. Derrière les boeufs l'homme tient les deux manches de l' "aray" . L'araire fait remonter la terre et forme les billons, tout en ramenant la semence vers le dessus. Le seigle n'aura donc pas les pieds dans l'eau durant l'hiver.

Particularité de la méthode : le semis a lieu avant le labour.

 

Prochaine étape le sarclage :

Il y a plusieurs sarclage en fin d'hiver et au printemps. Ici la photo a été prise le 2 avril 1913 à 14h30.

On y voit ici 3 femmes qui sarclent  la "cale" afin d'empêcher l'herbe d'envahir le seigle et elles en profitent pour rechausser un peu celui-ci. Elles sarclent en reculant et restent au même niveau afin de pouvoir continuer à discuter. Deux d'entre elles portent un chapeau de paille de seigle vraisemblablement. La photo complète montre un énorme châtaignier au milieu du champ. On en trouvait fréquemment de très vieux mais ils ont fini par mourir et on ne les remplace plus au milieu des champs ... quand on les remplace !

Cette photo a été prise le 21 avril 1892  à Gastes

Deux autres sarcleuses où on voit un seigle moins avancé au premier plan, mais déjà en épis au second plan.

Cette partie de photo des sarcleuses réalisée le 11 juin 1898 a fait l'objet de nombreuses prises différentes. Sur celle-ci on voit nettement les billons et fait remarquable, si les landais et les landaises sont de petite taille, on voit nettement que le seigle était très haut., plus d'un mètre cinquante  : le seigle est une céréale qui donne beaucoup de paille par rapport à l'orge , l'avoine ou même le blé. On avait besoin de cette paille longue et résistante pour : couvrir les bordes, on en faisait des tresses pour en faire des chapeaux et enfin il y avait une petite industrie de "paillons" qui étaient des enveloppes de paille pour la protection des bouteilles. Ce petit artisanat  ou ces petites  entreprises permettaient de faire rentrer de l'argent dans le tinel.  C'est la sélection des semenciers et les modes de culture qui ont abouti à des céréales moins hautes afin entre autre de limiter les risques de verse.

Le seigle est grand et les épis formés on va pouvoir bientôt le récolter.

 

La moisson : 

On est le  27 juin 1892 à Grué (Lüe) et on peut voir qu'à nouveau hommes et femmes sont associés dans cette étape du travail.

Les hommes la faucille à la main coupent le seigle ( en gascon  ségar, littéralement "scier" et la moisson était la séguère ) tandis que les femmes le posent en travers de deux billons pour le faire sécher au soleil avant de la rassembler en gerbiers de 13 gerbes à Roquefort (Le paysan de la forêt dans les Landes de la Gascogne. Lotte Lucas Beyer Cairn 2007) mais ce nombre toujours impair pouvait varier selon les endroits et les coutumes.

Dans la cale entre les billons on aperçoit au fond la deuxième culture : ici cela semble être du maïs qui constituera la deuxième récolte. Cela pouvait être aussi du panis dont on voit la récolte sur la photo qui suit.

 

La deuxième récolte :

Le cliché est du 2 octobre 1903 à Grué encore une fois. Les femmes récoltent ici la millade dont on discerne bien les grappes, elle servait beaucoup d'aliment de démarrage pour la volaille. Quand c'était du millet, il servait avant que l'usage du maïs ne se répande, à  faire la cruchade l'aliment de base et servait aussi à constituer des réserve dans des coffres en cas de disette car le millet se conservait longtemps. Les oiseaux appréciaient aussi beaucoup ces petites céréales : sur la photo on aperçoit un mât surmonté d'une hélice que je pense destinée à effrayer les oiseaux ! Les billons sont en partie arasés car la terre a servi à buter nos cultures de la cale. On est le 2 octobre et le cycle va pourvoir recommencer dans un mois avec le labour et les semailles du seigle : la terre a porté 2 récoltes aux rendements faibles grâce à un travail  important et un apport conséquent de fumier.

 

Ces photos de Félix Arnaudin ont été mises en scène, elles ont fait l'objet de plusieurs prises et quelquefois même un dessin en préparait la mise en scène. Les temps de pose étaient quelquefois longs (plusieurs secondes) et ses modèles devaient donc se prêter au jeu. Mais le résultat est là et ces compostions constituent de véritables tableaux en plus de leur valeur de témoignage.

 

Partager cet article
Repost0
Published by labbe.arue.over-blog.com
9 décembre 2022 5 09 /12 /décembre /2022 22:14

Le 29 mars de cette année mon père nous quittait après avoir  passé 89 ans parmi nous, une histoire qui commença le 20 novembre 1932 à Arue, à Castelfranc la maison familiale dont il a été plusieurs fois question dans ce blog, et se finit le 29 mars 2022 à l'hôpital de Mont de Marsan 2 jours après avoir quitté sa maison de Petite-Borde à Arue.  Arue qui tînt une grande place dans sa vie et dans son coeur, imprégné dès son enfance de l'atmosphère de notre village, des gens qui y vivaient, de notre belle langue gasconne qu'il parlait et écrivait si bien. Jusqu'à très récemment il notait encore les tournures, expressions et dictons qui lui revenaient, et faisaient la particularité de notre parler local.

En 1948 il écrivit un petit conte de Noël qu'il me transmit et que je montrai à Miqueù Baris alors mon professeur de gascon à Anglet. Miqueù qui était entrain de préparer un film avec son cousin Jacques Baris, photographe de talent, reconnut dans ce texte un gascon pur et authentique et proposa à son cousin de faire du conte le scénario de son film. Jacques accepta, il faut dire que nos familles se connaissaient depuis longtemps puisque son grand-père travaillait dans la maison de mon arrière grand-père à Castelfranc, que mon père avait gardé des relations avec son père Charles Baris puis avec Jacques Baris.

Le film est sorti en  2013 et a été projeté un peu partout dans les Landes ainsi qu'au musée d'aquitaine dans le cadre de l'expostion Félix Arnaudin.

Je vous livre le conte transcrit par Miqueù Baris dans la graphie normalisée, l'original était en graphie phonétique. La traduction est de Miquèu également.

 

I a gran pausa d'aquo, dens un vielh ostalot                        Il y a bien longtemps, dans une vieille masure,

Atcholat dens la brana,                                                          NIchée dans la brande

Damorava lavetz, aciu lonh, au Hautlana,                             Demeurait alors, là-bas loin dans le Haut-Lande,

Solet dab lo tropèth, l'agolhèr Jountirot.                              Tout seul avec son troupeau, le berger Jouantirot.

Lo jorn que hasè peisher, e la neit qu'i dromiva,                   Le jour il faisait paître, et la nuit il y dormait,

E ne' u caliva p'arren ende'u har viver,                                   Et il ne lui fallait rien de plus pour vivre,

Sonque la lèit d'agolha et l'aiga d'ua hontic.                         Si ce n'est du lait de brebis et l'eau de fontaine.

Espiatz com èra chic !                                                             Voyez comme c'était peu !

L'ivèrn qu'èra arribat e, dab eth, las ventenhas                      L'hiver était arrivé et avec lui les rafales de vent

qui hèn blanquir la peth e blurehar las venhas.                     Qui font blanchir la peau et bleuir les veines.

Entà banleù, un ser, de cap a mieja neit,                                C'est ainsi qu'un beau soir, vers minuit,

Un gran mormoc lusent, que'u secotic lo lheit.                        Un grand "mourmoc" brillant secoua son lit.

N'èra pas deus paurucs, mes totun, aqueth cop,                Il n'était pas peureux, mais cependant, cette fois-ci

Qu'estoc quilhat d'abord, que's gahec un esclop,              Il se redressa tout de suite, attrapa un sabot

Que'u lancèc à travers... à travers l'escurada !                     Le lança à travers ... à travers l'obscurité !

I avè pas mei arrèn, l'ahar s'èra escapada.                           Il n'y avait plus rien, l'ombre s'était échappée.

"Joan pèc, qu'as saunejat                                                     " Idiot, tu as rêvé

(e donc n'ac hès pas soent!),                                                ( tu ne le fais donc pas souvent !)

Pot pas èstar qu'aquo : vos que sii, autament ?"                  Ce ne peut être que ça : que veux-tu que ce soit?"

Que's tornec anisar, s'adromic, per la fin,                             Il se remit au lit, et s'endormit finalement,

Dinc au matin.                                                                        Jusqu'au matin.

Dishabte qu'èra aquo. Dijaus qu'i avè hèira.                         Cela se passait un samedi. Le jeudi il y avait foire.

Joanti caliva ana'i (lo bestiar barrat lèu)                                Joanti devait y aller (le bétail enfermé tôt) 

Véner un chicot de mèu                                                        Vendre un petit peu de miel

E vueitar quauqua veire.                                                        Et vider quelques verres.

Que trobec coneishuts e  que'us contèc la causa.             II trouva des connaissances et leur raconta la chose

" Malestruc, ce'u dison,                                                        " Maladroit, lui dirent-ils

Nos qu'am comprès, i a pausa.                                           Nous on a compris depuis longtemps.

Aquera gran lustror, que l'auras eshentada,                       Cette grande lueur, tu l'auras effrayée,

L'auras presa per posoèr,                                                    Tu l'auras prise pour un sorcier,

o pr'ua maishanta hada.                                                      Ou pour une méchante fée.

Tu, que l'auràs plumada, que pensi, a cop de pau,              Tu l'auras plumée, je pense, à coup de bâton,

En ço que't vienè disèr, qu'èra vasut Nadau.                        Alors qu'elle venait te dire, que Noël était né.

E nos que l'am seguida, dinc au petit mainatge.                  Et nous nous l'avons suivie, jusqu'au petit enfant

Que l'èm anats pregar                                                          Nous sommes allés le prier

E l'am balhat hromatge."                                                      Et nous lui avons donné du fromage."

Què dison au jouanti tot com s'èra passat,                          Ils dirent à Jouanti comment tout s'était passé,

Com ac avèn sabut, com ac avèn trobat.                       Comment ils l'avaient su, comme ils l'avaient trouvé

Ne responoc p'arrèn, se'n tornec a l'ostau.                          Il ne répondit rien, et s'en revint chez lui.

Vestit dab lo broi màntol e lo capeth tot nau,                  Vêtu de son joli manteau  et de son béret tout neuf,

Dab un veirot de meù e un plat de cruishada,                      Avec un petit pot de miel et un plat de cruchade

S'escapèc a galops dens l'auguitcha torrada.                        Il s'échappa en courant dans la molinie gelée,

E desmpuish lavetz, tots los ans, per Nadau,                         Et depuis lors, chaque année pour Noël,

Hèsi broi, hèsi lèd, se nèva o se plau,                           Qu'il fasse beau ou mauvais, qu'il neige ou qu'il pleuve

Lo prauba Jouantirot, dens l'aiga, dens la nèu,                    Le pauvre Jouantirot dans l'eau, dans la neige,

Cèrca tostemps l'estella, cap virat entau cèu.                       Cherche toujours l'étoile, tête tournée vers le ciel.

Se'u trobatz, mushatz-lo lo camin de capsùs,               Si vous le trouvez, montrez-lui le chemin du levant, 

E quen augi trobat Betleèm, e l'establa,                         Et quand il aura trouvé Bethléem et l'étable                 

Qu'arrapiarà au cèu end'adorar Jésus,                           Il grimpera au ciel pour adorer Jésus,

E pregar lo Bon Diù de har crebar lo Diable !                Et prier le Bon Dieu de faire crever le Diable !

 

Arue décembre 1948.

 

Noël 1948 c'est aussi la première messe télévisée, retransmise depuis  Notre-Dame de Paris. C'est peut-être aussi cela ce grand "mourmoc" qui rentre chez nous la nuit ! 

Mais qu'est-ce donc qu'un "mourmoc" mot intraduisible en français ?

Simin Palay dont le dictionnaire gascon/français fait référence nous donne:

Mourmoc : adj Qui est de forme indistincte, sans limites comme la brume, la haute mer. 

L'Abbé Vincent Foix dans son dictionnaire également nous donne :

Mourmoc :Sub. Forme indistincte. 

Il s'agit là d'un substantif comme dans  le poème. Et c'est Félix Arnaudin qui dans son dictionnaire nous en donne la définition la plus proche de l'emploi fait dans Jouantirot :

Mourmoc : Substantif masculin : 1 Forme indistincte, amas confus. 2 Spectre, Fantôme.

C'est bien la définition qu'en donnait mon père.

Cette dernière définition a semble-t-il aussi inspiré Pierre Méaule qui dans son dictionnaire gascon reprend les mêmes termes. Je vous invite d'ailleurs à consulter ou télécharger (gascohna.com) cet ouvrage complété par des articles intéressants sur la langue gasconne.

Lo mormoc a inspiré d'autres personnes, Ric Dou Piaou par exemple en a fait une chanson : "Lo Mourmoc neugue"

Autre mot que j'ai changé dans la traduction de Miquèu Baris : "Hautlana" que Miquèu traduit par haute -Lande alors que ma grand-tante, et la famille en général traduisait comme je l'ai fait "hautlana" par le "haut lande" qu'ils faisaient correspondre aux coins reculés du nord de Lencouacq.

Le titre du poème et le nom du personnage principal est comme souvent un diminutif, dans le cas présent de Jouan (jan), auquel a été ajouté un second diminutif en "ot" . Jouan qui devient Jouanti puis Jouantirot (avec un r intercalé pour la prononciation. Jean Labbé (1835/1898) notre bisaïeul lors de la conscription avait fait figurer "Jeanti" en dessous de son prénom sur les registres.

Sans passer trop de temps sur le texte on notera cependant l'emploi de joli mots comme les verbe arrapiar (grimper) , atcholar (s'accroupir) le mot de malestruc (maladroit) les formes particulières assez locales du parfait en c : lancec, secotic, responoc, s'escapec et l'emploi du subjonctif pour exprimer le futur dans les subordonnées  : "quen augi trobat" qui traduit une plus grande incertitude que l'emploi du futur de l'indicatif utilisé en français.

Voilà pour ce petit conte de noël, je vous souhaite à tous de bonnes fêtes.

Un grand merci à Miquèu Baris qui m'a passé texte et traduction tirés de son recueil "Suus camins de la familha".

 

 

Partager cet article
Repost0
Published by labbe.arue.over-blog.com
31 août 2022 3 31 /08 /août /2022 21:38

De passage à Mont de Marsan comme souvent l'été je suis repassé place de l'abbé Bordes (près de la Madeleine) et j'en ai profité pour regarder l'ancien garage Labeyrie (ex agence Courtès). Sur la façade qui fait vis à vis de l'église de la Madeleine on aperçoit encore l'enseigne "Labeyrie" en lettres rouges sur fond jaune. Je n'ai malheureusement pas réussi à retrouver aucun indice rappelant que ce fut la concession Clément Bayard. Dommage.

 

Partager cet article
Repost0
Published by labbe.arue.over-blog.com
24 mai 2022 2 24 /05 /mai /2022 21:26

Revenons au début du XXème siècle. Mon arrière grand-père Izarn Labbé habite Castelfranc la maison que son père a fait construire. Pour se déplacer il utilise une des premières voitures du canton une Clément Bayard. Il l'utilise fréquemment pour aller à Biarritz, à Pau au tir au pigeons et dans le Gers pour visiter les propriétés de sa femme à Monclar d'Armagnac.

Cette Clément Bayard il l'a achetée à la concession Labeyrie. Certains se souviennent peut-être encore du garage de Jeannot Labeyrie figure du Mont de Marsan des années 70, (A la place de l'actuelle agence courtès) qui vendait et montait des pneus à côté de l'église de la Madeleine.

On voit ici au volant Izarn Labbé, avec sa femme Marguerite et leur trois filles à L'arrière.

J'ai retrouvé dans ses comptes des achats d'essence au relais du Caloy entre Roquefort et Mont-de -

Marsan ainsi qu'une dépense qui m'a longtemps intrigué : enveloppes. Il s'agit en fait des pneus de voiture que l'on changeait souvent à l'époque.

Les voitures à Castelfranc

On retrouve ici la Clément-Bayard devant la maison. On peut voir que les volets, les frises du dessous du toit étaient blancs, alors que nous les avons connus plus tard en rouge "sang de boeuf". On pourrait également dater la photo de 1906 au plus tard car sur la façade Est (à droite sur la photo) il n'y a encore qu'un oeil de boeuf au second étage, qui sera remplacé par une porte fenêtre et un petit balcon.

Les voitures à Castelfranc

Il pourrait s'agir donc d'une Clément-Bayard AC 2G double Phaéton. Les usines clément Bayard ont fabriqué des voiturettes puis des voitures de 1899 à 1922. Celle-ci était mue par un moteur bicylindre de 1330 cm3 associé à une boîte 3 vitesses et marche arrière. Le refroidissement était assuré par un circuit d'eau avec radiateur et pompe à eau. 

Suivront une Berliet et sa dernière voiture une Citroën Rosalie.

Je pense qu'il pourrait s'agir de la Berliet. La maison a ses volets "sang de boeuf" qu'on lui a connu et on aperçoit le petit balcon sur la façade est construit après 1906.

 

 Il meurt le 14 juillet 1932 et mon arrière-grand-mère n'aura plus comme moyen de locomotion que son  ânesse ! Ma grand-tante qui vivait là conduisait et elle eût entre autre une 5cv  Citroën.

Autre 5cv Citroën celle de mon père dans les années 50 ou la 5cv était déjà une vieille voiture. On le voit ici devant la cuisine de Castelfranc avec ses deux frères à l'arrière.

La 5CV Citroën fut construite à 81000 exemplaires de 1922 à 1926. Son petit 4 Cylindres de 856 cm3 et  de 11cv de puissance pouvait vous emmener pendant des heures à 60km/h du fait de sa résistance. Ce fut une des premières voitures populaires d'Europe et il s'en construisit 81000 exemplaires.

Enfin fin des années cinquante la 403 de mon grand-père.

Depuis il y a eu d'autres voitures, d'époques différentes mais pas toujours avec la maison en arrière-plan.

Désolé pour la qualité des photos, mais je n'ai fait que de mauvaises copies avec mon téléphone.

Partager cet article
Repost0
Published by labbe.arue.over-blog.com
5 septembre 2021 7 05 /09 /septembre /2021 21:33

Ayant récupéré par hasard un livret concernant la distribution solennelle des prix du lycée Victor Duruy de Mont de Marsan en 1912 j'y ai retrouvé pas mal de noms connus de familles montoises et landaises d'autant plus facilement qu'y figurent les nombreux prix par classe pour l'année 1912, mais aussi une liste des principaux lauréats pour les années antérieures.

Petit rappel concernant Victor Duruy. Né à Paris le 10 septembre 1811, il mourra dans cette même ville le 25 novembre 1894. Après avoir été professeur au lycée Henri IV, des enfants de Louis-Philippe, Il fut ministre de l'instruction de Napoléon III de 1863 à 1869.

Souhaitant développer l'enseignement religieux, il se heurtera à une violente opposition de l'église. On comprend mieux la réaction de l'abbé Labbé, épisode raconté dans ce blog dans l'article intitulé " Du rififi à Lencouacq" où l'abbé Labbé le dimanche 28 juillet 1867 vilipendait  du haut de sa chaire le ministre impérial !

 

Victor Duruy est à l'origine de la construction du Lycée impérial de Mont de Marsan qui portera son nom. Depuis 1853 le collège des barnabites était le seul établissement secondaire du département. En 1866 ouvre donc le Lycée Duruy qui passera très vite de 170 élèves à 309 en 1869. 

Le fascicule que j'ai donc entre les mains nous donne un extrait du prospectus qui en plus du tarif nous détaille le trousseau des élèves. 

Et puisqu'on aborde le quotidien des élèves en 1912, suivent une photo du dortoir et des douches.

Pour cette distribution des prix de 1912, le discours d'usage de plusieurs pages, fut prononcé par M. Mazel professeur de cinquième. Je vous en propose quelques extraits.

Le discours commence sur ces mots :

" confiné "dans les honneurs obscurs des classes de grammaire" j'avais compté sur un oubli complaisant pour continuer à vivre dans un effacement sans péril. Monsieur le recteur, trop bienveillant pour moi, en a jugé autrement et me voilà chargé de prononcer le discours d'usage."

Ce discours dont le style est remarquable  d'un côté et un peu daté par certains autres est assez intéressant.

 

Abordant le sujet des aptitudes de l'élève et le sens de l'effort : 

"nous attachons plus de prix à l'effort, garant plus sûr du succès. Sans aller jusqu'à prétendre avec quelque grand écrivain, que le génie est une longue aptitude à la patience, je ne puis vous rappeler que rarement les dons naturels ont suffi pour produire un ouvrage parfait et que les meilleurs parmi nos poètes se sont appliqués à corriger par le travail ce que l'inspiration avait laissé inachevé."

Il insiste assez longuement sur la collaboration nécessaire parents professeurs : 

"Pour former "cet honnête homme" dont je parle, croyez-vous qu'il ne soit pas besoin du concours de tous ceux que la nature ou la société ont chargés (sic) de ce soin, je veux dire des parents et des maîtres ? Croyez-vous que l'on puisse faire oeuvre efficace si une parfaite harmonie cesse de régner entre tous ?"

Des sujets plus généraux :

"Au dessus des intérêts mesquins qui nous sollicitent sans cesse, il y a quelque chose de plus précieux et il arrive à chaque instant  que l'homme est obligé de choisir entre ce qu'il considère comme son bien et le bien même de la Société, dans des questions où il y va de l'honneur et de la vie. .../... l'homme n'est pas seulement créé pour son propre bonheur, mais encore pour celui des autres .../... qu'il n'y a pas de bonheur complet en dehors de celui que l'on partage avec ses semblables."

Alors qui sont les lauréats de ces prix ?

Citons-en quelques uns au hasard, car il sont nombreux...

L'architecte Jean Prunetti de Dax :  baccalauréat de mathématiques en juillet 1911.

Claude Depruneaux auteur de nombreux dessins et auteur d'articles d'histoire locale : sixième B 1912

2ème prix de dessin géométrique et 1er accessit de dessin d'imitation. 

Marc Lacôme d'Estalenx dit jean françois fils du compositeur Paul Lacôme d'Estalenx : prix d'honneur de rhétorique en 1903.

Mais aussi Léon Gishia Père, le docteur Daraignez comme médecin du Lycée et ses enfants comme étudiants ainsi que  de nombreux autres qu'il serait trop long d'énumérer.

 

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
Published by labbe.arue.over-blog.com
22 avril 2021 4 22 /04 /avril /2021 22:12

Le contexte :

 

Napoléon souhaitait intervenir au Portugal qui ne respectait pas son blocus contre l'Angleterre. Il fit entrer ses troupes en Espagne et en profita pour se mêler des affaires de la monarchie espagnole. Charles IV et Ferdinand VII son fils lui demandèrent un arbitrage lors des conférence de Bayonne qui se déroulèrent en avril, mai 1808. Ceci eut pour conséquence le soulèvement de Madrid sévèrement réprimé par Murat et qui provoqua le début de la guerre d'Espagne.

                      

                                   Célèbre tableau de Goya : El tres de Mayo

 

L'empereur entreprit donc un voyage jusqu' à Bayonne où il séjourna jusqu'au 21 juillet 1808.

 

Ce voyage avec les divers éléments qu'il comporte peut nous amener à nous poser plusieurs questions :

- Quel était le temps de préparation d'un tel voyage ?

- Comment l'information circulait-elle entre Napoléon et les administrations locales ?

_ Et enfin à quelle vitesse circulaient les personnes ?

Nous n'auront pas le temps ici de chercher toute les réponses, mais au moins pourront nous essayer d'en avoir une idée.

 

Voici la chronologie de ce voyage pour la partie landaise qui nous concerne : 

A Bordeaux depuis le 4 avril, où il laisse Joséphine, Napoléon  parvient dans les Landes au Poteau le  13 avril à  15h30. La voiture s'arrête en face de l'arc de triomphe établi selon les dessins de Panay architecte du futur hôtel de la préfecture à Mont de Marsan.  Il  est accueilli par le préfet Duplantier et une foule venue aussi de Gironde, son arrivée étant annoncée par des tirs de boites et d'artillerie, ce qui fait dire au journal des Landes : ".../... annonçant à nos déserts qu'ils sont riches de la présence de notre Auguste souverain". Le discours du préfet Duplantier (en place depuis 1802) parle entre autre des grands projets dont celui de relier l'Adour à la Garonne. En plus des personnalités qui constituent le cortège, la voiture de l'empereur sera escortée par les gardes nationales sur certaines portions du trajet.

Le prochain arrêt au relais des Agreaux (Retjons) l'empereur rencontrera les maires et les fonctionnaires publics.

A 7 heures arrivée à Roquefort première ville du département, après avoir traversé à l'entrée de la ville un arc de triomphe élevé par le conseil municipal avec un crédit de 1200 F. Sur un côté on pouvait lire "La ville de Roquefort à Napoléon, modèle des guerriers." sur l'autre : " La ville de Roquefort à Napoléon, modèle des législateurs." L'accueillent le Maire Labarchède, le Curé Douat et le juge de paix Couralet qui lui adresse un discours pendant que l'on change les chevaux. Il faut bien s'imaginer qu'à l'époque le pont sur l'Estampon était en bas, en face de la rue des vieilles écoles et qu'il fallait monter dans Roquefort ce qui nécessitait quelquefois le renfort de chevaux supplémentaires.

Le soir escorté par 200 hommes de la garde nationale il parvient à Mont de Marsan et passe la nuit dans l'hôtel Papin (ancien siège de l'Etoile ) où il arrive à 9 heures. Il est situé dans l'actuelle rue Dulamon. La préfecture ne sera construite qu'à partir de 1810 ce qui explique que les voitures de l'empereur ne seront pas remisées et resteront sous la garde de gendarmes. Il aura le temps d'écrire 2 lettres à 10 heures du soir; l'une adressée au maréchal Bessières à qui il demande de se tenir prêt à Burgos, l'autre adressée à au grand duc de Berg (Murat) où il s'informe de la position du Roi Charles. et ajoute :

Le lendemain après avoir reçu les autorités constituées de 5 à 7 heures il repart vers Bayonne via Tartas et Dax. Des échassiers escorteront le cortège qui marche au trot sans se faire distancer ! C'est la gravure anglaise qui illustre l'article précédent sur ce même blog.

Napoléon restera à Bayonne du 14 avril 1808 au 21 juillet 1808.

 

Comment l'empereur voyageait-il ?

La berline de l'empereur n'était pas encore du modèle de celles qui furent prises à Waterloo et qui furent construites par Getting en 1812, elles étaient aménagées spécialement pour lui. Néanmoins la berline  comportait des aménagements  qui permettaient de développer des couchettes pour les voyages de nuit.

Napoléon affectionnait particulièrement les peaux d'ours qui lui apportaient confort et chaleur. Il lisait, écrivait pendant ses voyages et il lui arrivait de jeter par la fenêtre un livre qui lui déplaisait. D'ailleurs arrivé à Bayonne il commanda une bibliothèque de voyage de 1000 ouvrages. Ces livres devaient avoir une couverture fine et peu de marge pour réduire l'encombrement.

En voyage Napoléon continuait de diriger ses ministres et les différents royaumes d'Europe conquis. Dans une lettre datée du 11 février 1808 à Eugène de Beauharnais alors vice roi d'Italie et qu'il considérait comme son fils, il écrit : " dans un état rien ne va seul ; tous les mois je fais la revue des ordres que j'ai donnés, et je me fais rendre compte de leur exécution. Ce n'est que comme cela que les affaires marchent. Autrement, les ministres dorment et laissent volontiers  tomber tout dans l'oubli."

La voiture était tirée par 4 chevaux au moins, mais il lui arrivait de faire la route à cheval et il n'avait pas peur de faire vingt lieues (environ 80km) à francs étriers. 

 

Quelles sont les personnes qui accompagnaient l'empereur lors de ce voyage ?

Nous l'avons vu, le Préfet des Landes Duplantier a accueilli Napoléon au poteau, il accompagnera "à francs étriers" le souverain jusqu'à Bayonne.

Le prince de Neuchâtel (Berthier de son vrai nom) occupant les fonctions de chef d'état-major, quant à lui voyageait dans la voiture de Napoléon.

Précédaient l'empereur, le grand maréchal du palais ,Duroc (Duc de Frioul), les généraux Bertrand aide de camp et Durosnel écuyer, et monsieur de Bondi (Pierre-Marie Taillepied de Bondy)  Chambellan.

 

A quelle vitesse le convoi se déplaçait-il ?

Parti à 3 heures du matin de Bordeaux, pour être à l'hôtel Papin de mont de marsan à 9 heures du soir, avec une distance parcourue de 125km environ on arrive à 7km/h arrêts compris. On peut penser que c'est lors des changements de chevaux que l'empereur rencontrait la population et les officiels.

Par contre lorsqu'il repasse en novembre 1808 ce sera à francs étriers.

 

Les communications avaient elles aussi leur vitesse propre :

Un courrier acheminé par la poste aux lettres (cf F. Thouvignon Bulletin de la Société de Borda) mettait 5 jours pour faire Paris/Bordeaux et 8 jours pour Paris/Toulouse.

Mais on sait aussi par la lettre qu'il écrit depuis Mont de Marsan le 13 avril au soir, qu'il a reçu venant d'Espagne les lettres de Murat des 8 et 9 avril dans la journée. Elles ont donc mis 4 et 5 jours à lui parvenir. Vraisemblablement par le service des estafettes mis au point par Lavalette (directeur général des postes, dans lequel les missives passaient de relais en relais par le postillon dans un portefeuille fermé, accompagné d'un livret  rapportant les heures et dates de transmission de chacun des porteurs. Des estafettes partaient tous les jours de paris vers Milan, Vienne, Madrid... 

Un autre moyen de communication que Napoléon encouragera et qui était en plein développement :  le télégraphe aérien des frères Chappe , qui fut testé sur la ligne Paris Lille dès 1794 ! Mais notre région n'était pas encore concernée.

 

Un parcours jalonné d'arcs de triomphe :

Au Poteau, à son entrée dans les Landes, il franchit un arc de triomphe orné d'inscriptions en Latin qui disaient : "La fortune le suit et la gloire l'éclaire", une autre faisait allusion au projet de canal Adour/Garonne.

A Roquefort comme évoqué plus haut, c'est un nouvel arc de triomphe orné de deux inscriptions.

A Mont de Marsan, c'est une inscription " Napoléon l'a dit, certes on peut le croire, Le bonheur de son peuple est sa plus chère gloire." qui orne l'hôtel de ville, alors que tous les arbres sont illuminés et que la ville résonne du son des cloches et des tirs d'artillerie. Il quittera le chef lieu escorté par des échassiers.

A St Paul les Dax c'est un arc plus champêtre qui accueille le héros, puisqu'il est formé de Pins et de lauriers, tandis qu'à Dax on retrouve un arc de triomphe orné du seul mot " Maximo". 

A Saubusse  on retrouve un monument champêtre gardé par un garde national en costume béarnais. Albert Larroquette dans son histoire des Landes, nous précise que le monument est établi depuis deux mois. Ce qui nous donne une information sur le temps de préparation de ce voyage.

Enfin un peu après Labenne au pont du Boudigau ou 12 maires sollicitent l'empereur pour le dessèchement du marais d'Orx. Une statue le représentant le bras tendu et sur la colonne l'inscription  dit " Napoléon ordonne et d'immenses marais enrichis de moissons nourrissent ses sujets".

L'empereur repassera en novembre 1808 pour se rendre en Espagne, puis en  janvier 1809 pour rentrer à Paris. Ces deux voyages seront plus rapides.

 

 

Les conséquences  et suite de ce voyage : 

 

Comme conséquence positive, l'hébergement de l'empereur à l'hôtel Papin, faute de préfecture permit au préfet Duplantier d'obtenir par un décret impérial du 12 juillet 1808, la propriété du couvent des clarisses pour y établir le future préfecture.

Ce même décret prévoyait le creusement du canal des Landes unissant l'Adour et la Garonne en passant par Mont de Marsan et Roquefort. Il prévoyait aussi le déssèchement du marais d'Orx. Seul l'ensemencement des dunes et l'entretien de la route furent continués.

Faisant suite à ce voyage, le passage des troupes, puis des prisonniers et soldats malades, ont eu pour conséquence  de petites épidémies de "peste" à Roquefort et des morts anonymes sur la route notamment à Arue. Voir aussi l'article consacré à "la route royale et les tranports à Arue" sur ce même blog.

Ce n'est qu'avec l'avènement de Napoléon III que certaines idées seront reprises et  les projets réalisés. 

 

Bibliographie :

Journal des Landes (ADL).

L'histoire sociale des Landes de Jean Cailluyer.

Histoire des Landes Albert Larroquette et Emile Prigent.

Bulletins de la société de Borda.

Le site Baskultur pour la visite de Napoléon à Bayonne.

Attelage patrimoine.com overblog .

Correspondance de napoléon 1er tome 16 (Gallica)

Numéro Hors série du Figaro du 27 nov 1999.

Napoleon.org :  Napoléon et les télécommunications.

 

 

Partager cet article
Repost0
Published by labbe.arue.over-blog.com

Présentation

  • : Le blog de labbe.arue.over-blog.com
  • : Aperçus de la vie dans les petites landes de Roquefort (40120) à travers une généalogie. Les sujets abordés concernent tant l'histoire locale, que l'agriculture, les techniques anciennes, les personnages...
  • Contact

Recherche